vendredi 8 juin 2012

Sapphire et Ruby Valley

Nuit de plus en plus froide, pas forcément au thermomètre, mais au frisson-mètre, l'air étant maintenant presque aussi froid que dans le désert du centre, mais en plus très humide… On se réveille dans notre champ, transformé pour quelques heures en champ de boue!

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Notre déjeuner sous un eucalyptus nous apporte la chaleur des premiers rayons du soleil et le chant (??) des nombreux oiseaux du coin, dont kakatoès et lori, petits perroquets multicolores qui ont été les animaux préférés de mon enfance avec leurs grands cousins les aras macaos!

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Je me rappelle avoir essayé de nourrir, "comme à la télé", un ara avec une cacahouète pincée entre mes lèvres et être reparti du zoo avec une arcade sourcilière ouverte ayant perdu un peu d'hémoglobine et de ma naïveté de gamin!

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Journée tranquille, on a décidé de rester deux nuits sur notre terrain vague. L'après-midi nous partons à la recherche de pierres précieuses, et de Max, un local que l'on nous a recommandé. Pas facile à trouver, le Max, au milieu de ces innombrables chercheurs de pierres tous plus ou moins mal installé dans des mini-bidonvilles vivant dans des caravanes en ruine, renforcées reliée pas des bouts de tôle, de bois ou de plastique! Un vrai quart-monde, tourné vers l'espoir de la découverte de LA pierre qui les rendra riche: ambiance ruée vers l'or, mais à l'âge de raison, quand la réalité rattrape un peu le rêve. Toujours est-il que tout les habitants cherchent un peu, que tous sont "posés" sur LEUR concession, et creusent de-ci delà, au pifomètre, essayant TOUS de revendre le produit de leur découverte, pas assez précieux pour être taillé ou revendu à des grossistes. Tous ont aussi du matériel près à louer et sont content de pouvoir initier les touristes.

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On finit par trouver Max, dont l'enseigne, une pancarte en carton délavé, annonce la raison sociale au pinceau… "Maxigem" (gem= pierre précieuse en anglais).

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On s'arrête et on fait connaissance avec Max et son fils de 3 ans, … Max! Une baraque en tôle, et devant chez lui, 5 tonneaux d'eau avec une potence chacun, permettant aux clients de faire tremper leur tamis pour les rincer. Le principe est simple: Max remplit un saut de terre pour 10$ et nous met à disposition le matériel pour le tamiser. La terre vient de n'importe où dans la vallée… tout simplement. Ensuite on verse la terre dans un tamis grossier posé sur un tamis plus fin, et on trempe le tout dans l'eau en secouant pour concentrer au centre les pierres plus lourdes.

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On brasse un peu à la main pour aider à laver la terre et on recommence.

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Ensuite on retourne le gros tamis sur un sac de jute, et on cherche les grosses pierres… qui pourraient faire 2cm de diamètre… Puis on passe au petit tamis et on fait de même. Etonnamment… on trouve pratiquement 10 pierres précieuses par petit tamis!!! En fait c'en est plein! Des saphirs surtout, mais aussi des zircons, une gemme semi-précieuse en bijouterie.

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Si on est chanceux on peut trouver un petit rubis. La taille de nos pierres n'excède pas 4-5 mm mais c'est assez fascinant de voir que cette terre regorge de ces micro-trésors et petit à petit on se laisse envahir par la … fièvre.

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Fièvre savamment alimentée par Max qui nous relate plein d'anecdotes du coin comme ce type qui urinait et a vu apparaître dans la terre "lavée" une pierre magnifique, ou celui qui shootant une bouteille de bière découvre un énorme saphir! La vallée est pleine de ces histoires, sans compter les vraies trouvailles faite par les sociétés exploitant les filons avec des moyens industriels!!!

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Mais la palme de l'histoire extraordinaire revient à la Queensland Black Star… En 1938 un gosse de 12 ans joue autour de la maison familiale à Rubyvalley. Fils d'un chercheur de saphirs, Roy Spencer a déjà l'œil du spécialiste et lorsqu'il tombe sur une énorme pierre noire, il la ramène en courant à son père. Celui-ci, bien que connaisseur, pense qu'il s'agissait d'un gros crystal sans grande valeur, et met la pierre de côté! Pendant 10 ans, elle servira à caler la porte de la maison!! Puis, un jour, apprenant qu'il existant de gros saphirs noirs il se remet à observer sa cale! Puis la nettoie, l'analyse et finalement la fait voir par d'autres. Il s'avère s'agir d'une pierre de 1156 carats, le plus gros saphir jamais découvert! Pour donner une idée, on dit qu'il vaut la peine de faire tailler une pierre si elle fait au moins 4 carats brut! (Pour les minéraux le carat est une unité de masse, soit 200mg: 5 carats font donc 1 gramme. Pour les métaux précieux, c'est la pureté qui s'exprime en carat, 24 carats signifiant un métal pur). Le monde entier entend vite parler de la découverte et un joaillier arménien, Harry Kazajian fait le voyage et acquière la pierre pour 18'000 $ en 1947, ce qui vaut à la famille Spencer une nouvelle maison. Il l'étudie pendant 2 mois et finalement il la taille (il s'agit d'un travail très subtil et qui peut aussi bien abîmer la pierre!) en un gigantesque cabochon (pierre ovale, sans angle) de 733 carats. La pierre noire laisse alors paraître sa vraie valeur, montrant à la lumière une étoile à 6 branches et des reflets d'une grande beauté. Le joaillier gagne alors en renommée et fait fortune dans le milieu sans vendre la pierre gardée comme le symbole de sa chance. Longtemps gardée par la famille, elle finit par être prêtée de nombreuses années à un musée et puis par être vendue quand les prix proposés ne permettaient plus de rester philanthrope… C'est un gamin, tombé en pâmoison devant le bijoux qui s'étant juré de l'offrir un jour à sa mère, en fit enfin l'acquisition pour un montant resté secret. En 2002 la pierre est revendue pour… 100 millions de dollars US … 4x plus que le plus gros des diamants… Fabuleuse trajectoire!

Nous repartons les yeux brillants avec chacun un petit sachet de miettes de pierres précieuses et allons faire un tour dans un "bon coin" histoire de tenter notre chance. Sans matériel, on cherche le gros, l'exceptionnel, l'unique, en fait on se balade. Julie s'émerveille à penser qu'on est peut-être là debout sur une fortune, ce à quoi je réponds que notre bonheur est dans nos mains à être là en famille, à l'autre bout du monde, à chercher un trésor caché au coucher du soleil.

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On se retrouve au coin du feu, à faire le pain dans la braise pour un superbe résultat: c'est ça notre trésor!

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Je suis sûr que la famille entière a passé la nuit à faire des rêves de contes de fées.

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