jeudi 7 juin 2012

Ilfracombe et la Capricorn Highway

C'était promis, la famille se réveille sous les crépitements du feu qui redémarre, pour les toasts mais surtout pour redonner le moral aux troupes frigorifiées et permettre un départ pas trop tardif.

On reprend la route et poursuivons l'horizon qui continue à s'échapper à l'infini, cette fois au milieu d'immenses prairies jaunes parsemées de troupeaux de bovidés, vaches avec ou sans bosses, taureaux énormes. Sur la route c'est toujours l'hécatombe de kangourous et tous les 500m voire tous les kilomètres, une tâche sombre signale un groupe de corbeaux ou de rapaces qui s'envolent du cadavre d'un 'roo ou d'un walabi, pour nous laisser plus ou moins passer, avant de se reposer juste derrière nous! Nous touchons du bois mais n'avons jamais eu d'accident avec une de ces grosses souris à ressort…: la chance ou peut-être nos sifflets à ultra-sons montés plus par superstition qu'autre chose, ou alors simplement parce qu'on obéit à la règle et qu'on ne roule plus dès que le soleil pâlit, à moins d'avancer au ralenti!

La vie humaine réapparaît petit à petit, d'abord par ses barrières et sa gestion du territoire, puis par ses animaux, puis ses fermes, gigantesques domaines, petites villes à elles seules à des centaines de kilomètres de la civilisation. Eloignées des grands axes, on ne les devine parfois qu'aux immenses châteaux d'eau visibles à l'horizon, aux éoliennes qui alimentent les pompes à eau, aux tours de communications bardées d'antennes diverses ou aux manches à air, témoins qu'une piste d'atterrissage pour petits avions se cache parmi les herbes. La vie dans ces coins reculés est à ce prix, une autonomie totale et une organisation de petites villes.

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Nous avons pris un axe sud-est pour un temps et rejoignons la "Capricorn Highway" qui file pratiquement rectiligne sur près de 1000km sur le tropique du Capricorne depuis Ilfracombe jusqu'à Rockhampton, au bord de l'océan pacifique.

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Ilfracombe frappe d'entrée: "Tidy town winner 2000 & 2003" (Tidy = propre). Les maisonnettes sont soignées, les jardins propres et rangés, et la route et la voie de chemin de fer sont bordées par une immense rangée de vieux tacots, vieux tracteurs, vieilles machines de chantier et même de vielles locomotives à vapeur.

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Tout les vieux véhicules du coin ont été récupérés et souvent offert par la population, et déposé là, côte à côte, offrant un véritable musée des transports de la première moitié du vingtième siècle.

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Ici, pas de ramassage de objets encombrants, pas de démolition de vieil voitures, pas de "Thévenaz-Leduc" local. Tout se garde au fond des jardins et des propriétés, et donc tout peut réapparaître d'un coup de baguette magique ou sur l'initiative d'un citoyen sensible! En plus la ville s'est fait fort de garder quelques-uns de ses bâtiments d'époque sans les toucher, quitte à les laisser en ruine, témoins de la vie d'alors, la vie des premiers habitants, de pionniers, arrêtés ici sur la route vers l'ouest, vers l'or, comme aux Etats-Unis finalement!

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On jette un œil à la Langenbaker House, pour le fun, une maison importée par le train de Rockhampton, par une famille qui partait à la conquête de l'ouest avec sa maison, et restée là depuis la fin du 19ème, comme arrêtée dans le temps: une vieille chaise longue, un lit, une "machine à laver" le linge, une baignoire d'époque, témoin de la vie d'alors, celle d'une famille de 11 enfants dans un pré non loin du chemin de fer, au milieu des champs de coton.

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Tout est soigné à Ilfracombe, les maisons, les rues, et même les toilettes publiques. Un petit abri propose même un écran multimédia, qui permet d'écouter des témoignages filmés des "vieux" du coin, racontant pour peu qu'on les comprenne (!!!) leur vie d'enfant à Ilfracombe! Génial et émouvant aussi de voir une si belle volonté de bien faire, perdu au milieu de nulle part! On profite largement de la petit pause, non prévue, mais tellement bucolique…

Après Ilfracombe, nous plongeons dans la partie humide du Queensland, plaines le plus souvent inondées pendant l'hiver – on se demande d'ailleurs comment elles se vident – et la nature se reverdit, les arbres grandissent, les oiseaux colorés réapparaissent et on retrouve l'ambiance des forêts d'eucalyptus. Sur quelques centaines de kilomètres la route longe d'immenses territoires humides, restant des inondations catastrophiques de cet "été" et surtout de l'été 2010-2011, qualifiées de "bibliques" et qui avaient fait 200'000 sinistrés juste dans cet état. Le Queensland est le 2ème état de l'Australie par sa taille, d'une superficie de 3x la France… ! Un des plus gros producteur mondial de charbon, son économie a été mise à l'arrêt pendant plusieurs mois début 2011 et il s'en relève à peine, surtout que les inondations de cette année ont été assez sévères aussi.

Nous traversons l'état en direction de l'océan avec un minimum d'arrêts, forcés d'atteindre Sydney avec assez de marge pour pouvoir vendre notre voiture sans trop y laisser de plumes. On s'arrêtera néanmoins dans la vallée des Ruby et des Saphirs histoire de jouer un peu aux prospecteurs, puis dans un des parcs nationaux réputés, le parc de Carnarvon, avant de passer quelques jours à Fraser Island, une île entière inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO.

Nous nous arrêtons à Sapphire, petit village de la vallée, où une aire gratuite est signalée. J'adore l'esprit australien sur ce point: le bled possède quelques motels (ruée vers les pierres précieuses oblige!), un ou deux campings … et un terrain vague au centre du village, pour les campeurs "budget" qui veulent vivre avec le minimum. Mais le village met quand-même à disposition des toilettes et de l'eau gratuitement. On est loin de l'irréalisme de certaines communes européennes qui pensent qu'en forçant les gens dans des barrières, ils n'auront pas à gérer le problème du camping sauvage, le résultat étant une nature mise à mal tout autour… Ici c'est l'inverse: on sait que vous venez, donc on vous accueille quelque soit votre budget, bravo!

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