Jeudi 3 novembre
Départ de Katmandou à 8h en 4x4 avec Chitra, son frère aîné Balman et le chauffeur. La capitale est hyper sale et polluée et nous circulons au pas dans la poussière et la fumée à travers la banlieue de plus en plus pauvre et les tas d'ordures. A plusieurs endroits des Népalis trient les détritus à la recherche de quelque chose d'utilisable par exemple pour remplir un matelas que d'autres confectionnent à même le sol. La pauvreté extrême est partout et les gens, entassés les uns sur les autres sont là à attendre… mais quoi?
Après une heure de route, on s'engage à la sortie de la ville dans une descente très raide sur une route de terre à la poussière extrême. Les arbres aux abords sont complétement couverts de poussière couleur sable, les étalages des dernières échoppes sont uniformément grisées par la terre et les gaz d'échappement. La "route" est déjà de plus en plus chaotique et vertigineuse. Je ne pense pas qu'on soit au niveau des routes Boliviennes mais on en est pas loin! On comprend bien qu'en cas de mousson (il paraît que ça arrive…) des torrents de boue puissent dévaler ces pentes sans trop se poser de question sur ce qui y vit!
On s'arrête dans une échoppe pour acheter quelques bananes qui poussent ici comme de la mauvaise herbe) et presque sur la route trois femmes font la lessive et lavent leurs légumes à un point d'eau ruisselant de la pente, alors que les camions croisent déjà avec difficultés!
Après trois heures on s'engage sur une vraie piste, quittant la pseudo route et l'ambiance tourne vite au raid 4x4. Le chemin est très étroit, les cailloux qui le couvre de plus en plus gros et les ornières de boue aux endroits mouillés de plus en plus profondes. Etonnamment la route est empruntée par les bus et les camions, 4x4 évidemment mais qui passent mieux que nous ce genre d'obstacle grâce à leur garde au sol. On les dépasse parfois de manière assez osée vu la pente et les "accotements non stabilisés" !!!
A un moment les ornières sont trop profondes (50cm??) et entre deux on sent que les camions on déjà largement raclé la boue avec leur châssis. On essaie de passer mais en vain. Nous sortons donc tous; l'angle que prend la jeep en direction de la pente n'incite pas à rester à l'intérieur… et finalement nous nous mettons à essayer de remplir l'ornière avec des pierres pour permettre au chauffeur d'en sortir. Couvert de boue, nous finissons par y arriver et à continuer sans encombre.
Nous nous arrêtons pour midi dans un boui-boui incroyable. Bistrot de bled totalement perdu, ruelle pleine de boue et habitants assis partout plus ou moins parterre à regarder le spectacle des touristes "perdus". Nous lavons nos chaussures au seul point d'eau et attendons que Chitra nous obtienne un repas. Ce sera œufs durs et thé noir…. Lui par contre prend un Daal Bhat (riz avec soupe de lentilles et légumes) ainsi que pour son frère, qui le mange à la main, à la népalaise.
Nous reprenons ensuite la route en poussant la voiture qui n'a plus de démarreur puis le chauffeur se fait un travers d'anthologie en plein village en essayant de ne pas se laisser diriger par les ornières, dans l'hilarité générale!!! Ambiance détendue malgré tout! Nous parcourons plusieurs heures dans les ornières, les routes de montagnes vertigineuses et les dépassements audacieux! Les rizières se suivent en terrasses à l'infini dans la brume, séparant les micro-villages les uns des autres.
La voiture bringuebale dans tous les sens pendant des heures et derrière, Balman (le frère de Chitra), qui s'est endormi, se fracasse sans arrêt la tête contre la vitre, sans se réveiller! On rit abondamment, chauffeur compris à chaque impact, se demandant comment il fait pour ne pas se réveiller, à moins qu'il soit déjà dans le coma!!
Après sept heures de cross nous débarquons à Arughat Bazar où nous déchargeons tout. Nos deux autres porteurs sont là et se répartissent les charges. Nous apprendrons plus tard à les connaître un peu mieux.
On traverse le village, un pont suspendu métallique et l'on croise une foule disparate et multi-ethniques et culturelle: népalais, mais d'origine Gurung, Bramhane, Tibétaine, Chetri etc etc Les accoutrements vont du costard cravate bricolé au sari, en passant par les guenilles et les costumes d'écolier. Après une demi-heure, nous nous arrêtons au check point où nous devons nous enregistrer pour le treck et faire valider nos autorisations. Les différences de prix pour les treks sont importantes et probablement une des raisons pour lesquels le Manaslu Tour est encore peu courrus. Jusqu'à l'an passé le trek coûtait dans les 500$ alors que les tour des Annapurnas ne coûte que 20$. La faute au gouvernement qui fixe des prix de manière pas très cohérente. Les associations de guide se sont battues pour des tarifs moins rédhibitoires et actuellement le tarif est de 100$. C'est d'ailleurs le même problème au Dolpo, au Mustang et ailleurs.
A Arughat on croise une centaine d'élève de 7 à 10 ans en costume bleu. Cela rappelle des souvenirs à notre guide qui a été dans la même école de 1200 élèves, à plusieurs jours de marche de son village, pendant 10 ans!
Nous repartons à bord d'une autre jeep, plus adaptée à la route plus défoncée (est-ce possible??) qui nous attend. La Jeep Bolero qui nous attend est effectivement pas mal défoncée aussi et la première chose que nous faisons est de nous arrêter pour faire le plein d'huile… Un gros bidon et un garçon qui le siphonne dans l'habitacle à travers un conduit qui accède directement au moteur, protégé par un chiffon: c'est plus pratique que d'ouvrir chaque fois le coffre et comme la voiture consomme 2x plus d'huile que de diesel, ça gagne du temps! D'ailleurs le bidon et son siphonneur font le voyage avec nous!
L'heure de route à venir est surréaliste… Tellement chaotique que les piétons nous dépassent régulièrement et que les enfants ont franchement peur de verser dans le ravin tellement les angles pris par la jeep sont limites. Je suis moins stressé, mais il faut dire que je suis assis de l'autre côté! On traverse des gués et des ponts de nuit et là l'aide-chauffeur sort pour assurer le passage avec une lampe de poche…: faudrait pas mettre la roue sur une des nombreuses planches pourries! Bref… on arrive à destination plutôt soulagés! Là nous faisons encore une demie heure à pied et passons notre premier pont népalais (= suspendu), un peu tendu (nous, et justement pas le pont…!!) quand-même!
Arrivée à Soti Khola, 700m, à 18h30… il fait déjà nuit noire. On découvre une auberge plus que simple, sans électricité et tout juste éclairée par UNE SEULE ampoule de 12V alimentée par un panneau solaire. La cuisine est minimaliste, foyer de feu de bois avec un tas de terre séchée pour éloigner les casseroles. Les chambres à l'étage sont très simples, façon écurie sans la paille, mais propres. Les matelas sont pratiquement virtuels, sur une planche en bois passablement ajourée… Faudra faire avec, on est à 700m et m'est avis qu'à 4400m le représentant Bicoflex passe encore moins souvent… Pour l'instant on a les moyens de se battre, en piquant les moletons de la "chambre" d'à côté. Chap bénit sa décision de prendre son Thermarest (matelas gonflable…), de toute façon porté par nos porteurs.
A côté, les enfants sont serrés à trois dans leur chambre: on rajoute les sacs quasi au chausse-pied!
Nous découvrons les toilettes à la turques avec une certaine réticence vu l'odeur, mais l'eau courante permet une certaine propreté tout de même.
La petite fille du coin, Antana, 5 ans, s'affaire toute la soirée à la cuisine et au dehors, balais, vaisselles, cuisine, sans que sa mère ait à dire quoi que ce soit. C'est son boulot et elle le fait avec application (et c'est pas un jeu!!). Elle est incroyable!
Pour le souper une soupe lyophilisée suffira et nous évitera un choc "culturel-gastrique" trop brutal. On sera fit jusqu'au col, point à la ligne! (on est pas totalement contre… cela dit!)
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